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Ventes de résidence principale et secondaire : un alourdissement de la fiscalité à venir dès 2025 ?

La loi des finances pour 2025 est en cours de discussion et les idées lumineuses pour alourdir la fiscalité se multiplient. Nul doute que l’on va subir de gros bouleversements pour l’année à venir. Après les annonces sur la réforme de la location meublée (analyse lors de notre conférence du 30 octobre en direct sur le sujet), la hausse de la flat-tax qui va alourdir la fiscalité sur les placements de tous les français, les réformes envisagées pour annuler l’impôt avantageux sur la succession via l’assurance-vie… la nouvelle idée du jour concerne vos biens immobiliers. Un amendement a été voté pour venir modifier le calcul de l’impôt lorsque vous vendez un bien immobilier. La plus-value réalisée pourrait bien engendrer une taxation bien plus élevée que celle en vigueur habituellement, même pour la résidence principale ! Voyons ce qui est prévu et on discutera des stratégies en fin d’article.

Impôt actuel : la différence entre résidence principale et résidence secondaire.

L’amendement touche à la fiscalité sur la plus-value, soit la différence entre le prix d’achat et le prix de vente de votre maison. Aujourd’hui, il n’y pas de fiscalité si vous vendez votre résidence principale dans laquelle vous habitez depuis un an. Si vous achetez un bien 100 000 € et que vous le vendez 500 000 €, les 400 000 € de plus-value ne sont pas imposés sur la résidence principale.

En revanche, tout autre bien immobilier (maison de vacances, bien louée, bien acheté en plus de la résidence principale…) est considéré par le fisc comme « résidence secondaire » au sens de l’impôt sur la plus-value. Dans ce cas, la plus-value subit 19% d’impôts et 17.2% de prélèvements sociaux. Les 400 000 € gagnés évoqués précédemment peuvent donc engendrer 144 800 € d’impôts ! Ce n’est même pas terminé car on peut avoir une surtaxe de 6% supplémentaire soit 24 000 € de plus.
C’est énorme me direz-vous ! Mais heureusement, on a des abattements pour durée de détention. Si on garde la résidence secondaire plus de 5 ans, on a chaque année une diminution de l’impôt et des prélèvements sociaux. À partir de 22 ans, les 19% d’impôts ont disparu et au bout de 30 ans, les prélèvements aussi. Ces abattements permettent une économie énorme pour chaque année acquise et font gagner des dizaines de milliers d’euros au niveau de la fiscalité. Vous avez le détail ici avec un simulateur : comment calculer l’impôt sur la plus-value immobilière ? Figurez-vous que ces abattements sont aussi remis en question pour 2025 !

La fin de l’exonération fiscale sur la résidence principale.

C’est l’amendement I-CF275 qui vient créer la surprise. L’exonération de plus-value sur la résidence principale est remise en question. Le nouveau texte joue sur la durée de détention. Jusqu’ici, il fallait habiter dans le bien pendant 1 an pour éliminer toute la fiscalité et c’est une stratégie souvent utilisée. La nouvelle réforme vient changer ce délai et l’amener à 5 ans ! Cela signifie que toute vente de résidence principale qui n’a pas été habitée en tant que tel durant 5 années entières subira la fiscalité sur la plus-value. Et attention, avant 5 ans il n’y a aucun abattement donc ce sera 36.2% de fiscalité sur le gain pris par votre maison sur la durée.

Si la mesure est validée avec le projet, cela viendrait pénaliser toutes les personnes qui utilisent cette courte durée pour acheter et vendre des biens tous les 2/3 ans. Certain sont requalifiés en marchand de biens mais beaucoup de personnes arrivent aujourd’hui à faire un bénéfice non imposé en achetant un bien pour l’habiter un an et le revendre. Plus dramatique, cet impôt énorme viendrait toucher tous les particuliers qui sont obligés de vendre à cause des aléas de la vie de tous les jours : divorce, séparation, changement de travail, rapprochement de la famille… C’est un réel problème et l’amendement le prend en compte. Pour le moment, il stipule simplement que les cessions de résidence principale à cause d’un « motif impérieux familial, médical ou professionnel » resteront exonérés si c’est vendu avant les 5 ans. On va surveiller ces conditions de près donc car toutes les stratégies et la bonne conduite à adopter pour éviter l’impôt vont en dépendre. L’amendement nous informe que la vente pour acquérir une nouvelle résidence principale, le décès, la séparation, la mutation professionnelle ou l’entrée en Ehpad en feront partie. Une fois le texte voté, il faudra attendre le détail avec le BOFIP pour voir ce qui sera réellement respecté ou non.

L’impôt sur la plus-value s’alourdit sur la vente des résidences secondaires.

Toucher à la fiscalité sur la vente de la résidence principale est déjà assez énorme… mais on a même pas le temps de reprendre notre souffle que l’amendement I-CF1814 apparait pour réformer le cas des résidences secondaires ! Je rappelle qu’au niveau de l’impôt sur la plus-value immobilière, quand on dit « résidence secondaire » ça concerne toutes les ventes de biens qui ne sont pas « résidences principales ». Personne ne passe au travers. A l’inverse de l’amendement du paragraphe précédent qui a été adopté, notons que celui-ci est toujours en cours de discussion.

L’idée est d’annuler toute l’histoire des abattements ! Terminé l’exonération progressive de plus-value dans le temps avec la fin de l’impôt au bout de 22 ans et des prélèvements sociaux au bout de 30 ans. Quitte à tout bouleverser, changement total du taux de l’impôt : on oublie les 19%+17.2% et on passerait à la flat-tax à la place. La fin des abattements progressifs est une nouvelle horrible pour les revendeurs qui fait exploser l’impôt. Bien sûr, remplacer les 36.2% globaux par la flat-tax à 30% est un peu meilleur mais ne soyez pas dupes. Déjà, le projet de loi a un amendement qui fait passer la flat-tax de 30% à 33% et il a été adopté. D’autre part, avec les abattements actuels, on passe sous le taux de 30% d’impôts global rapidement au bout de quelques années de détention.

J’achète un bien 100 000 € et je le vends 170 000 € au bout de 20 ans; ce n’est pas ma résidence principale. Aujourd’hui, avec les abattements pour durée de détention, l’impôt de 19% subit 90 % d’abattement et les prélèvements sociaux de 17.2% subissent 24.75 % d’abattement. Cela vient du fait que je l’ai conservé 20 ans, chaque année passée fait augmenter ces abattements.

Les 70 000 € de plus-value vont engendrer un impôt total de 10 390 €. Si la réforme passe et qu’on retient uniquement la flat-tax, je paierai alors 70 000 * 33% = 23 100 €.

Si cette mesure passe, l’impôt de la plus-value sur les biens détenus longtemps viendrait à exploser. Celui sur ceux détenus depuis peu resterait assez proche. Pour compenser cette perte, l’amendement propose de remplacer les abattements par un calcul de décote basé selon l’inflation. On n’a pas encore les modalités mais je ne suis pas fan d’un tel système. On connait aujourd’hui beaucoup de choses donc l’évolution est calquée selon l’évolution de l’inflation. Dès que c’est trop en faveur du contribuable, le législateur va souvent limiter l’effet exceptionnellement sur une année. On peut le voir avec l’évolution du taux du livret A ou la revalorisation du barème de l’impôt qui a été limité par le passé car l’inflation forte le rendait trop intéressant.

Comment réagir suite à cette annonce ? Faut-il vendre dès la fin de l’année ?

Je commence par la réforme sur les résidences secondaires. L’amendement n’est pas voté mais seulement discuté ; s’il est voté, il faudra encore que ce soit validé en fin d’année ; si c’est le cas, la date de commencement est prévue pour le 1er janvier 2026. De ce côté-là, il n’y a donc pas le feu au lac. Il reste très intéressant de savoir que le gouvernement envisage des pistes pour surtaxer la plus-value sur les biens hors résidences principales. La stratégie classique de conserver un bien longtemps peut disparaitre. On connait maintenant cette fragilité potentielle et on en tient compte dans la stratégie patrimoniale. Une personne décidée à vendre mais qui attend un peu pour gratter une ou deux années d’abattement ne doit plus le faire par exemple. En revanche, il est inutile de se précipiter à vendre si on n’en avait pas l’envie ou le besoin. Il faut surveiller de près l’évolution et notamment la date de mise en œuvre. Si le texte passe, il sera alors plus simple de faire les calculs et de réagir pour vendre avant 2026 si vous avez gros à perdre.

La réforme sur la résidence principale m’inquiète beaucoup plus. C’est un des premiers conseils de vie dans la gestion patrimoniale et qui n’est pas près de changer. Outre tous les avantages que cela présente, l’acquisition de la résidence principale avait cette petite cerise sur le gâteau avec l’exonération à terme. Je suis réellement surpris que le gouvernement envisage de toucher à la fiscalité d’une telle chose qui concerne tout le monde et peut complètement pénaliser certains projets de vie. Si l’amendement est validé et c’est parti pour, il faudra étudier avec précision les détails que le fisc va apporter aux exonérations. J’en ferai un article complet dès que ça sortira. En effet, un « BOFIP » expliquera en détail ce que le fisc considère comme « séparation », comme « mutation professionnelle » etc… permettant de ne pas payer l’impôt sur la plus-value si on vend avant 5 ans. Si vous n’êtes pas exactement dans le cas donné par ce BOFIP, alors vous aurez la surprise de payer l’impôt sur la vente ou d’avoir un redressement. La rédaction de ce document et son analyse seront indispensables :

  • soit tous les cas sont prévus et le texte englobe pleins de situations permettant à tous de se retrouver dans les cas exceptionnels de mutation professionnelle, décès, séparation… dans ce cas, le délai de 5 ans ne changera pas grand chose pour les français et vise surtout à empêcher certaines personnes d’acheter et revendre sans impôt sur une année.
  • soit le texte sera pointu en imposant des conditions strictes pour se retrouver dans un cas. Si par exemple le BOFIP indique que « séparation » au sens de la plus-value sur résidence principale concerne seulement les couples mariés ou pacsés, tous les concubins sont exclus etc… C’est un exemple mais un grand classique de la fiscalité : le moindre mot ou condition sur ce texte pourra tout changer. Dans ce cas, la nouvelle mesure aura un impact pour énormément de mondes et beaucoup de contribuables verront avec stupeur un impôt important à payer au moment de la vente de leur résidence principale.

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